
Stellantis: les millions de Carlos Tavares soumis une dernière fois à la colère des actionnaires

La rémunération de Carlos Tavares doit encore faire polémique mardi lors de l'assemblée générale du groupe Stellantis, dont il a été écarté fin 2024 après des résultats décevants.
L'ex-directeur général du géant de l'automobile (qui regroupe une quinzaine de marques, dont Peugeot, Fiat, Opel et Chrysler) a bénéficié, pour 2024, d'une rémunération atteignant 23,1 millions d'euros, en baisse de 37% par rapport à l'année 2023 (36,5 millions).
C'est l'équivalent de 350 fois le salaire moyen des 259.000 salariés de Stellantis à travers le monde (65.993 euros), en baisse pour la première fois depuis la création du groupe en 2021.
John Elkann, président du conseil d'administration de Stellantis et dirigeant par intérim, a touché près de 2,8 millions d'euros pour l'année.
Les actionnaires du groupe doivent se prononcer mardi à partir de 14H00 sur cette politique de rémunération, à titre consultatif. Ils l'avaient contestée à 52% en 2022, 48% en 2023, et 30% en 2024, sans que cela ne perturbe le versement prévu par le conseil d'administration.
"Le package de rémunération de 23,1 millions d'euros proposé pour l'ancien directeur général dans le rapport de rémunération semble excessivement généreux, en particulier compte tenu des performances opérationnelles médiocres et des circonstances entourant la démission forcée", a protesté le gestionnaire d'actifs AllianzGI le 8 avril.
Après des premières années marquées par des profits record, le groupe Stellantis a vécu une très mauvaise année 2024, freiné notamment par des difficultés en Amérique du Nord. Le bénéfice net du groupe a chuté de 70%, à 5,5 milliards d'euros, et Carlos Tavares a été poussé vers la sortie.
L'ancien directeur général doit toucher par ailleurs une indemnité de départ de 2 millions d'euros et un bonus de 10 millions d'euros. Mais un autre bonus de 10 millions lui a été refusé.
- Une "démission" -
La société de conseil aux investisseurs Proxinvest a aussi recommandé de voter contre la résolution concernée.
"Le départ étant volontaire puisque c'est une démission, aucune indemnité n'aurait dû être attribuée au dirigeant", a souligné Proxinvest, même si M. Tavares a été poussé vers la sortie.
"Au regard des performances de la société, il peut être considéré que la société est en situation d'échec ; or il n'est pas acceptable d'attribuer une indemnité de départ à un dirigeant ayant mené la société à cette situation d'échec".
Le président de la République lui-même avait critiqué le montant du salaire de Carlos Tavares en 2022. Le ministre de l'Industrie Marc Ferracci s'est exprimé dans le même sens dimanche sur France 3, soulignant qu'un "principe de modération" devait s'appliquer. Mais "je ne pense pas que ce soit fondamentalement à l'État de déterminer le niveau des salaires, le niveau des rémunérations", avait-il aussitôt ajouté.
La présidente du comité de rémunération de Stellantis, Wan Ling Martello, a concédé dans une lettre aux actionnaires que "la rémunération est une question complexe et sensible", et qu'il existe "des opportunités d'améliorer l'alignement avec les attentes des investisseurs".
Wan Ling Martello insiste sur la nécessité "d'attirer et de retenir des talents de classe mondiale au sein d'une entreprise mondiale et d'assurer une structure d'incitation appropriée, surtout durant cette période de transformation disruptive significative dans notre industrie".
Pour peser indirectement sur cette politique, AllianzGI, qui détient moins de 1% du capital de Stellantis, a également annoncé qu'il allait s'opposer à la réélection de deux membres du conseil d'administration qui siègent au comité de rémunération, le Français Benoît Ribadeau-Dumas (qui représente Exor, le groupe de la famille Agnelli) et Fiona Clare Cicconi, qui représente les salariés.
M.Gonzalez--SFF