Semi-conducteurs, pharmacie et tomates: nouveaux droits de douane en vue aux Etats-Unis
Washington continue de souffler le chaud et le froid sur l'économie mondiale: l'administration Trump a lancé lundi une première étape vers la mise en place de droits de douane sur la pharmacie et les semi-conducteurs, 72 heures tout juste après avoir suspendu les surtaxes appliquées à l'électronique.
Le ministère du Commerce a ouvert une enquête visant à déterminer si la prépondérance des importations dans ces deux secteurs présente un risque, ou non, pour la sécurité nationale.
C'est à l'issue de ce type d'enquête que Donald Trump avait pu imposer des droits de douane sectoriels de 25% sur l'acier et l'aluminium, ainsi que l'automobile.
Le président américain n'a jamais caché sa volonté de pouvoir imposer rapidement une surtaxe sur les produits pharmaceutiques et les semi-conducteurs.
Lundi, son principal conseiller économique, Kevin Hassett a assuré que "tous les secteurs seront couverts. La question est: quelle loi s'applique. Il s'agit de déterminer ce qui affecte la sécurité nationale. Si nous achetons quelque chose d'un autre pays, alors nous ne seront pas prêts en cas de guerre, s'ils décident de nous en priver".
En fin de journée, Washington a également annoncé la fin d'un accord concernant l'importation sans taxe de tomates mexicains, qui représentent plus de 90% des tomates importées aux Etats-Unis, et qui seront taxés à près de 21% dès mi-juillet.
Des annonces qui tombent au moment où les marchés respiraient après l'exemption vendredi des surtaxes touchant les produits électroniques, largement importés de Chine, désormais visée par des surtaxes de 145%.
Wall Street a suivi la tendance observée en Asie puis en Europe, terminant en hausse: le Dow Jones prenant 0,78%, le Nasdaq 0,64% et le S&P 500 0,79%.
Le ministre du Commerce, Howard Lutnick, avait pourtant averti dimanche que le secteur serait bien concerné par des droits de douane sectoriels, qui pourraient se concrétiser "probablement dans un mois ou deux".
Donald Trump s'est montré lui ouvert au compromis lundi, se disant prêt à "regarder comment aider les constructeurs automobiles", assurant qu'il ne voulait "faire de mal à personne".
- "Petit pas" -
Même si la Chine est au premier chef dans le viseur, le secrétaire américain au Trésor Scott Bessent a estimé lundi qu'il n'y avait pas de raison pour que les économies des deux pays se dissocient.
"Il y a un grand accord à réaliser à un moment donné", a déclaré M. Bessent sur Bloomberg-TV.
Il a reconnu qu'un tel accord serait plus difficile à atteindre qu'avec d'autres nations car "la Chine est à la fois notre plus grand concurrent économique et notre plus grand rival militaire. Donc cela va nécessiter une formule un peu spéciale".
S'agissant d'autres pays, M. Bessent a annoncé que les négociations bilatérales "vont aller vite" pour résoudre les différends douaniers. "Nous avons eu le Vietnam la semaine dernière, le Japon mercredi, la Corée du Sud la semaine prochaine", a-t-il déclaré
Le ministère du Commerce chinois a reconnu dimanche le "petit pas" fait par Washington sur les produits high-tech, tout en exhortant les Etats-Unis "à faire un grand pas pour corriger leurs erreurs, annuler complètement la mauvaise pratique des droits de douane réciproques et revenir sur le droit chemin du respect mutuel."
Le protectionnisme "ne mène nulle part", a répété le président chinois Xi Jinping, dans des propos rapportés lundi par l'agence officielle Chine Nouvelle.
M. Xi a entamé lundi une visite au Vietnam, avant de se rendre en Malaisie et au Cambodge, pour renforcer les relations commerciales de son pays.
Dans ce contexte tendu, l'Organisation des pays exportateurs de pétrole (Opep) a revu légèrement à la baisse sa prévision de croissance de la demande de pétrole pour 2025, citant notamment les droits de douane américains.
Tout en continuant à assommer la Chine, Donald Trump a semblé donner un peu de répit aux autres partenaires commerciaux des Etats-Unis, en les délestant mercredi pour 90 jours des tarifs douaniers annoncés auparavant, et en ne leur ajoutant plus que 10% de droits de douane.
En visite à Washington, le commissaire européen au Commerce, Maros Sefcovic, a assuré que l'Union européenne (UE) était prête à trouver "un accord équitable" avec les Etats-Unis mais qu'un "effort conjoint significatif, de part et d'autre", serait nécessaire pour y parvenir.
Une configuration qui pourrait créer un risque de récession et forcer la Réserve fédérale américaine, la Fed, à abaisser ses taux plus vite, quand bien même les droits de douane tireraient l'inflation à la hausse, a jugé lundi un de ses responsables, Christopher Waller.
Y.Harris--SFF